Chantier d'été franco-allemand dans le village-martyr d'Oradour-sur-Glane
Du 24 août au 7 septembre 2014, a eu lieu le chantier d’été ASF à Oradour-sur-Glane, près de Limoges. Tout commença en septembre 2013, suite à la visite officielle des présidents français et allemand à Oradour-sur-Glane, pour commémorer les 70 ans du massacre. Il y fut décidé qu’un chantier d’été ASF se tiendrait sur ce lieu haut symbole de la barbarie nazie.
En effet, le samedi 10 juin 1944, la 2e SS-Panzer-Division du Reich allemand pénétra dans ce village, très fréquenté par les gens de la région, et y fusilla les hommes dans des granges, brûla les femmes et les enfants dans l'église puis incendia tout le village.
Les douze participants du chantier ont eu le temps, pendant deux semaines, de non seulement se confronter à l'histoire de ce lieu mais également de comprendre son histoire en interrogeant les locaux et en discutant des faits entre Français et Allemands de l'équipe. Les tâches du groupe ont été premièrement des travaux de rénovation du village en ruine et d'un local sur le site. Et deuxièmement, la retranscription de témoignages de survivants et de résistants de la région dans le centre de documentation du Centre de la mémoire d'Oradour
Tout au long de la soirée du dimanche 24 août, dans le camping de la Glane à Saint-Junien, situé à une dizaine de kilomètres d'Oradour, s'installèrent donc les 11 volontaires dans trois de ses petits chalets.
"Nous arrivons à Oradour avec un réel enthousiasme et une grande motivation"
C'est ce que Annemarie et Claire, les deux encadrantes du chantier, avaient écrit, les mois précédants, aux partenaires franco-allemands dans la lettre annonçant leur arrivée. Et elles ne se sont pas trompées, ce fut même un des ingrédients indispensable à la réussite de ce chantier. Le groupe, composé de 2 hommes et 9 femmes, de 9 Allemands et 2 Françaises, trois artisans, deux retraités, une salariée d'ASF et des étudiants dans divers domaines (histoire, français, théologie, etc.), réunissait des participants âgés de 19 à 67 ans. Un groupe certes très hétérogène, mais néanmoins très solidaire et uni. Tout le monde s'est, dès le départ, vite senti à son aise. Dès le premier soir et ce jusqu'à la fin du chantier, les repas étaient ponctués de réguliers fou-rires, de discussions intenses et passionnées sur l'histoire en général et le quotidien du chantier, ou encore sur les différences culturelles franco-allemandes, les anecdotes et plaisanteries de chacun allant bon train.
Entretien du jardin du village-martyr
Les travaux de rénovation du local
La journée-type de travail des volontaires
A 8h, l'équipe responsable du petit-déjeuner installait le café brûlant sur la table. En effet, le café et la bonne humeur matinale étaient les éléments indispensable aux bons commencements des journées au chantier. A 9h, l'équipe se divisait entre les deux voitures. Le déjeuner, préparé la veille, était installé dans le coffre ainsi que les affaires pour la journée. L'arrivée sur le lieu du chantier, une vingtaine de minutes plus tard, après avoir traversé de jolis champs limousins, était l'occasion de s'entretenir avec les partenaires sur place de l'avancée des différents travaux et de l'organisation de la journée.
En accord avec la DRAC (Direction Régionale des Affaires Culturelles), trois principales tâches ont été décidées, en amont du chantier. La première était un travail d'entretien et de conservation des ruines du village-martyr. Dans ce domaine, les travaux concernaient l'entretien des rails de l'ancien tramway (qui peu à peu, avec le temps, disparaissent sous la terre et l'herbe), mais également le nettoyage des jardins et des clôtures des maisons détruites (peu à peu envahies par le lierre, la mousse et le liseron). La seconde tâche était la rénovation d'un local, situé près de l'entrée nord du site et abandonné depuis quelques années. Après avoir décollé le papier peint, les murs, portes et fenêtres ont été lessivés et repeints, grâce aux précieux conseils des trois artisans de l'équipe. La DRAC, de son côté, a fourni tout le matériel nécessaire à la bonne réalisation des travaux. La troisième tâche s'est déroulée dans le Centre de la Mémoire d'Oradour et consistait à écouter des témoignages de rescapés du massacre d'Oradour ou de résistants de la région, à les retranscrire ensuite dans un document sur ordinateur, et à les sauvegarder sur la base de données du Centre. Le but principal était la conservation d'une trace écrite de ces témoignages oraux, d'en apprendre plus en détails sur les histoires personnelles des survivants ou témoins du massacre et de contribuer à leur bonne conservation.
Les journées de travail, sont passées à toute allure et se sont prolongées souvent, à la demande des volontaires jusqu'en début de soirée. Ensuite, de retour au camping, la vie quotidienne du groupe demandait également de la réflexion et de l'auto-organisation.
Déblayer les rails de l'ancien tram qui traversait le village...
... et rassembler les cailloux et pierres dans une brouette
La découverte des cultures et mémoires françaises et limousines
Un repas pour 11 personnes affamées en fin de journée n'est pas toujours évident à prévoir ! Les repas se sont néanmoins toujours déroulés dans une ambiance détendue et propice aux discussions. Des spécialités régionales, telles que les madeleines Bijou, des saucissons et pâtés limousins ou encore des chocolats en forme de marrons (que l'on trouve partout dans la région) ont été dégustées par le groupe. Les deux semaines, qui se déroulèrent sous un soleil radieux ont également été ponctuées de nombreux moments de détente et de sorties :
Le 3e jour de leur arrivée, les volontaires ont eu l'immense privilège de visiter le village-martyr avec Monsieur Robert Hébras, un des derniers survivants du massacre. Cet homme exceptionnel par son dynamisme et sa gentillesse, continue régulièrement de témoigner devant des classes ou visiteurs de passage à Oradour et a accepté de témoigner devant le groupe. Agé de 88 ans aujourd'hui, mais de 19 ans lors des faits, il a raconté son histoire personnelle et répondu très volontiers aux questions des volontaires lors de cette visite de trois heures, chargée en émotions.
Une randonnée au site Corot était également organisée par un joli dimanche après-midi. Puis, durant une journée, le groupe a visité Limoges, sa cathédrale (voir photo ci-dessous) et son musée Dubouché dédié à la porcelaine. Enfin, une autre visite était prévue dans deux villages de la région classés "plus beaux villages de France" : Montrol-Sénart et son éco-musée et Mortemart.
Un soir, un atelier-débat était également proposé aux volontaires. Le thème de la discussion portait sur le devoir de mémoire en France et en Allemagne, aujourd'hui et à propos d'Oradour. Un texte sur les idées révisionnistes actuelles, à propos du massacre toujours, fut également proposé aux volontaires pour ouvrir encore la discussion.
Les volontaires sur le toit de la cathédrale de Limoges...
... ou devant l'arbre de la liberté et l'église du village-martyr
A la fin du chantier, le groupe eut la chance d'être remercié et convié à un grand buffet accompagné de discours dans une salle communale d'Oradour. Monsieur le maire d'Oradour-sur-Glane, Philippe Lacroix, la sous-préfète Mme. Nathalie Valleix, Mesdames Beate Klarsfeld et Gésine Lötzsch, Messieurs Robert Hébras et Albert Valade, ayant tout deux perdus de nombreux proches dans le massacre et de nombreux autres invités, étaient présents.
Pour leur dernier après-midi de travail, les participants convièrent les partenaires du chantier à les rejoindre dans le local rénové, sentant encore la peinture fraîche, pour déguster une part de gâteau maison, les remercier à leur tour et non, pour se dire adieu, mais seulement pour se dire : "à l'année prochaine !"
Apéritif et dîner de bienvenue le premier soir de l'arrivée des volontaires
Le travail de retranscription de témoignages de survivants et résistants au Centre de la Mémoire
Marcial, un salarié de la DRAC et partenaire du chantier, fait visiter le centre ville de Limoges et sa cathédrale au groupe
Visite du village-martyr avec un des derniers rescapés du massacre : Robert Hébras
Désherbage (mousse et lierre) dans le jardin d'une maison du village-martyr